Des biomarqueurs pour prédire la progression d’une maladie rénale

Pathologie silencieuse et souvent diagnostiquée tardivement, l’insuffisance rénale touche entre 5 à 10% de la population française, soit entre 3 à 6 millions de personnes. Très longtemps asymptomatique, le dépistage est vivement encouragé pour s’assurer que ses reins soient en bonne santé. Sujet de nombreux travaux de recherche, une nouvelle étude révèle que certains biomarqueurs pourraient prédire le risque de développer une maladie rénale chronique chez des patients souffrant de lésions rénales aigues. Nous vous en disons plus sur cette découverte.

Organes qui remplissent plusieurs fonctions vitales, les reins jouent un rôle de régulation et de filtration et sont également des producteurs importants d’hormones, d’enzymes et de vitamines. Ils sont indispensables au bon fonctionnement de l’organisme. La moindre atteinte peut entraîner une insuffisance rénale et avoir des conséquences importantes sur la santé. Il est donc essentiel de les préserver !

Qu’est-ce qu’une insuffisance rénale ?

On parle d’insuffisance rénale lorsque les reins ne sont plus en mesure d’assurer pleinement leurs fonctions : celles de filtrer le sang pour éliminer les déchets produits par l’organisme en les évacuant dans les urines.

Une maladie rénale est dite « aigue » si l’altération du fonctionnement des reins est passagère et donc réversible. Elle peut être causée par une infection bactérienne, une intoxication médicamenteuse, une obstruction des voies urinaires par des calculs, etc. On parle d’insuffisance rénale chronique lorsque ces organes ne peuvent plus du tout se rétablir et que leur destruction est alors irréversible. L’hypertension et le diabète sont souvent les principales causes de leur détérioration. Il est alors nécessaire d’avoir recours à la dialyse pour assurer artificiellement leurs fonctions ou de bénéficier d’une greffe pour les remplacer.

Bien qu’elle puisse être traitée, l’insuffisance rénale aigue peut toutefois devenir chronique à plus long terme. L’insuffisance rénale aigue est le plus souvent observée chez les patients hospitalisés dont les reins sont affectés par le stress ou des complications médicales ou chirurgicales. Cela peut ralentir leur rétablissement et provoquer des dommages à long terme aux reins.

Le dépistage des maladies rénales se fait principalement par :

– Une prise de sang. Elle consiste à mesurer le taux de créatininémie. La créatinine est un dérivé d’un composant musculaire, la créatine, elle-même synthétisée par le foie et stockée dans les muscles pour servir à la production d’énergie. La créatinine résulte de la dégradation de la créatine, c’est donc un déchet transporté par le sang, filtrée par les reins et éliminée dans les urines. Si le taux de créatinine augmente dans le sang, cela signifie que la filtration par les reins fonctionne mal et qu’il y a insuffisance rénale.

– Une analyse d’urines. Recueillies à tout moment de la journée, une recherche de protéinurie et d’albumine est effectuée. A noter, les urines d’une personne en bonne santé ne contiennent aucune protéine ni albumine.

En cas de lésions rénales aigues, une analyse de biomarqueurs pourrait également permettre de détecter un risque d’évoluer de façon chronique.

Quel lien entre maladie rénale aigue et chronique ?

Selon une récente étude menée par l’équipe de Chirag Parikh, à la direction de la division de néphrologie à la faculté de médecine de l’université Johns Hopkins, les patients souffrant d’une insuffisance rénale aigue auraient un risque trois à huit fois plus élevé de développer une maladie rénale chronique. Face à ce constat, ils ont souhaité déterminer les liens entre les changements des biomarqueurs urinaires et sanguins et la progression de la maladie rénale après avoir développé une insuffisance rénale aigue.

Un biomarqueur est un paramètre biologique, détecté dans certains tissus ou liquides biologiques, qui permet de diagnostiquer ou de suivre l’évolution d’une maladie. En cas d’atteinte rénale, trois sources de biomarqueurs sont étudiées :

  • L’urine ;
  • Le sang ;
  • Le tissu rénal.

Sept biomarqueurs urinaires et deux biomarqueurs plasmatiques analysés  

656 patients atteints de lésions rénales aigues ont participé à cette étude. Pendant une année, les scientifiques ont étudié sept biomarqueurs urinaires et deux biomarqueurs plasmatiques de lésions rénales, d’inflammation et de santé tubulaire. Au cours de ces travaux, récemment publiés dans le Journal of Clinical Investigation, les chercheurs ont constaté que chaque augmentation d’écart dans le changement du biomarqueur KIM-1 et MCP-1 dans l’urine et TNFRI dans le plasma entre le début de l’étude et un an après était associée à un risque deux à trois fois plus élevé de développer une maladie rénale chronique.

Selon le professeur Parikh à la tête de ces travaux de recherche, ces résultats suggèrent que « des lésions tissulaires et une inflammation durable, ainsi qu’un rétablissement plus lent de la santé tubulaire, sont associés à un risque plus élevé de progression de la maladie rénale. » Ils ont par ailleurs observé que l’augmentation du biomarqueur urinaire UMOD était associée à une réduction de 40% du risque de maladie rénale chronique.

D’après l’équipe de scientifiques, ces résultats pourraient permettre aux médecins de mieux comprendre si l’organisme se rétablit correctement après une lésion rénale et, éventuellement, à prévenir la progression de l’insuffisance rénale aigue vers une forme chronique. Le Docteur Chirag Parikh insiste sur l’importance de poursuivre les recherches sur ces processus biologiques en cours, afin de mieux comprendre ces mécanismes.

Sources :

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