Maladie rénale : Quelles sont les questions éthiques qu’elle soulève ?

Article publié le 17 juin 2025

La maladie rénale est une pathologie complexe qui évolue généralement de manière silencieuse jusqu’à des stades parfois très avancés, ce qui explique son diagnostic souvent tardif. Selon son stade d’évolution, sa prise en charge soulève des questions délicates quant à l’équité des patients face aux traitements qui leur sont proposés. Ces enjeux éthiques s’intensifient particulièrement lorsque les patients sont âgés, trop fragilisés ou présentant des comorbidités importantes et que l’équilibre entre bénéfices et qualité de vie devient crucial. Nous vous apportons un éclairage sur ce sujet délicat.

Quels sont les principes d’éthique en santé ? 

Très complexe, l’éthique médicale repose sur trois piliers fondamentaux :

  • Les règles déontologiques, édictées dès le Vesiècle avant Jésus Christ (serment d’Hippocrate), en appellent aux notions de compétence, de générosité, de dévouement, de désintéressement et de secret médical.
  • Les règles morales protègent le malade de la dérive que pourraient introduire en ce début de XXIesiècle les grandes évolutions des sciences de la vie : évolution thérapeutique (découverte de la radiothérapie, par exemple) et évolution biologique (découverte du code génétique et de ses applications, comme la thérapie génique).
  • Les règles scientifiques, enfin, imposent au corps médical de vérifier que toute attitude médicale, surtout thérapeutique, repose sur des notions dont la rigueur scientifique est réelle.

Ces trois aspects de l’éthique médicale se retrouvent dans les règles, définies en 1964 par la déclaration d’Helsinki et complétées en 1975 par celle de Tokyo, qui président aux expérimentations. Les principales résolutions de ces déclarations figurent maintenant dans les protocoles expérimentaux. Elles assurent au patient le respect de son choix, manifesté par un consentement libre et éclairé.

Les dilemmes éthiques pouvant se poser en néphrologie

La néphrologie constitue un domaine où les questionnements éthiques sont particulièrement prégnants. On parle en effet d’éthique en néphrologie car cette spécialité médicale confronte très souvent les soignants, les patients et leurs familles à des décisions complexes, à la fois médicales, humaines et sociales.

En cas d’insuffisance rénale terminale, les critères d’attribution des greffons, basés sur la compatibilité immunologique, l’ancienneté d’inscription et l’urgence médicale, tentent d’équilibrer l’utilité (maximisation de la survie des greffons) et l’équité (accès équitable à la transplantation). Cependant, les disparités d’accès persistent, soulevant des questions sur la juste répartition des chances. Face à ce constat, la pénurie d’organes a conduit peu à peu à l’élargissement des critères de prélèvement vers des donneurs à critères élargis et au développement de programmes innovants comme le don croisé ou le don altruiste, chacun soulevant à nouveau leurs propres questionnements éthiques.

Le consentement éclairé constitue un autre pilier des préoccupations éthiques en néphrologie. La complexité des options thérapeutiques, leurs bénéfices et risques respectifs ainsi que leurs impacts sur la qualité de vie doivent être communiqués de manière adaptée pour permettre une décision véritablement éclairée. Cette dimension est particulièrement critique chez les patients âgés ou présentant des comorbidités importantes, pour lesquels la balance bénéfice-risque des thérapies de suppléance peut être discutable. Le respect de l’autonomie implique également de reconnaître le droit du patient à refuser ou à interrompre un traitement, même lorsque cette décision peut engager son pronostic vital. Ces situations demandent une réflexion individualisée et une évaluation pour chaque patient.

Par ailleurs, la décision d’initier, de poursuivre ou d’interrompre la dialyse chez des patients au pronostic très réservé ou en fin de vie constitue un défi éthique majeur, nécessitant une évaluation soigneuse de la balance bénéfice-souffrance.

Le traitement conservateur, qui privilégie les soins de support sans recours à la dialyse, émerge comme une option thérapeutique légitime pour certains patients, particulièrement les plus âgés ou ceux présentant des comorbidités lourdes. Cette démarche nécessite une expertise palliative pour gérer efficacement les symptômes de l’urémie terminale et assurer une fin de vie digne.

La planification anticipée des soins et les directives anticipées prennent une importance cruciale dans ce contexte, permettant aux patients d’exprimer leurs préférences concernant l’intensité thérapeutique souhaitée lorsque leur capacité décisionnelle sera altérée. Le développement d’outils pronostiques plus précis aide à anticiper l’évolution de la maladie et à engager ces discussions sensibles à un moment opportun, évitant tant l’obstination déraisonnable que l’abandon thérapeutique prématuré.

La prise en charge éthique de la maladie rénale requiert donc une approche intégrant les dimensions cliniques, psychosociales et existentielles de la pathologie. Cela demande une écoute fine, un respect profond du patient et un travail constant en équipe interdisciplinaire pour faire au mieux dans chaque situation. Le recours à une Unité de Concertation Éthique en Néphrologie est alors indispensable.  Par ailleurs, le néphrologue doit non seulement maîtriser les aspects techniques de sa spécialité, mais également développer des compétences en communication, en prise de décision partagée et en éthique clinique. 

Sources :

 

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